L’écriture web est souvent réduite à quelques règles rédactionnelles, souvent empruntées au journalisme. Mais faute d’approche globale, l’efficacité est rarement au rendez-vous.
1. Ecrire pour être lisible
Revenons au degré zéro du rédactionnel : la typographie web. Vos lecteurs doivent être capables de distinguer et de reconnaître les caractères. Cette évidence est pourtant peu partagée. Vous produisez peut-être d’excellents contenus mais personne ne fait l’effort de les lire.
Les points à vérifier
- Vous utilisez une police sans empattement (sans serif), au moins pour le texte courant. Vous bannissez les polices gothiques et peu lisibles, sauf si vous êtes maître typographe et que vous savez parfaitement ce que vous faites.
- Votre police de caractère est d’une taille suffisante, lisible sur tous les écrans. Vous permettez au lecteur d’agrandir le texte.
- Vous utilisez des contrastes de couleur suffisants entre la police et l’arrière-plan. Vous évitez les arrières-plans perturbés qui brouillent la lecture.
- Bien entendu, vous soignez les interlignes, évitez les capitales, les italiques, le texte justifié. Bref, vous respectez ces quelques règles d’accessibilité.
2. Ecrire pour être lu
On parle ici de la complexité des mots et de la structure des phrases. Il s’agit de vérifier que le niveau de lecture correspond à celui de votre cible.
3 règles de base
- Utilisez des mots simples, aussi courts que possibles. Proscrivez le jargon et les néologismes, dont certaines agences se gargarisent.
- Privilégiez les phrases courtes et simples. Les conjonction de coordination ou de subordination alourdissent le style et imposent un défi à la mémoire à court terme. Le gouvernement britannique interdit même les phrases de plus de 25 mots. Ils ne prévoient malheureusement ni amende, ni peine de prison.
- Employez la voix active. C’est d’abord un moyen simple de réduire le nombre de mots.
Comparez, ça saute aux yeux :
Le chien mange le chat
Le chat est mangé par le chien
Il existe des tests pour vérifier la lisibilité. Celui de Flesch-Kincaid est même intégré à Word. J’avoue les trouver difficiles à exploiter. Le bon sens est votre plus sûr allié. Repérez les phrases trop longues, coupez au milieu, recommencez. Cherchez les adverbes et virez-les. On respire !
3. Ecrire pour être compris
On arrive à l’objectif final de tout contenu. Le lecteur peut-il en comprendre le sens et en tirer les conséquences ? Vous voudrez par exemple que l’utilisateur fasse une action. Oui, c’est souvent la finalité de l’information.
- Adoptez le langage adapté à votre cible. Cette règle assouplit une des précédentes : la simplicité a en effet ses limites. Pensez avant tout à vos utilisateurs et choisissez une terminologie qu’ils maîtrisent. Quitte à perdre certains utilisateurs non prioritaires.
-
Voyez les choses à l’envers. La pyramide inversée est votre amie. Commencez donc par la conclusion. Rappelez-vous de la série Colombo : vous connaissez le meurtrier dès le début et pourtant vous regardez l’épisode en entier…
- Soyez visuel. Images, schémas, infographies, vidéos sont plus vite assimilées par l’esprit humain.
- Soyez bref. Moins vous êtes long, plus on fera l’effort de vous lire. Souvenez-vous également que de nombreux utilisateurs vous liront sur mobile.
Ça ne suffit pas
Etre lisible, lu et compris constitue déjà une avancée majeure pour 99 % des sites web. Ces trois points sont nécessaires mais pas suffisants. Il manque encore la quatrième dimension de l’expérience utilisateur : la pertinence. C’est la capacité d’un contenu à rencontrer les besoins, rationnels et émotionnels, d’une cible.
Source : Legibility, Readability, and Comprehension : Making Users Read Your Words
Crédit image : Lieutenant Columbo, par Yury Ostromentsky (CC BY 2.0)
Et du coup, en dernier point (et certainement pas le moindre), je dirais : savoir faire une veille, savoir rechercher l’information, savoir recouper l’information, savoir lire, savoir prendre des notes, savoir analyser des documents de diverses sources, savoir comparer ces documents, savoir émettre des hypothèses, savoir argumenter, savoir faire preuve de pédagogie et expliquer un sujet, donc savoir identifier les cibles, savoir connaître ses cibles et se mettre à leur place, savoir mettre en forme un texte, savoir utiliser un CMS.
Arrêtons de croire que ça prend moins d’une solide formation 🙂
Que du bon sens. Le problème est plutôt en amont de mon côté : il faut déjà que le client qui a un joli site arrive à se dégager du temps pour le remplir. Ce n’est pas faute de comprendre l’enjeu et l’importance de la chose. Mais bien souvent, un copié-collé (sic) de la plaquette convient très bien dans un premier temps (premier temps qui a tendance à s’éterniser jusqu’à la refonte suivante).
Très bonnes considérations dans cet article. Toutefois, il y est dit, je cite « Il s’agit de vérifier que le niveau de lecture correspond à celui de votre cible. » Or voilà amha le grand problème actuel des interwebs : à trop vouloir ratisser large (c’est la fameuse course à l’audience), il faut niveler par le bas. Exit les phrases aux tournures trop alambiquées ou à la grammaire que seul le twittos de « Bescherelle ta mère » peut appréhender. Or donc on crée un phénomène sociétal où l’écriture n’est plus qu’un moyen d’expression au même titre que le langage corporel. On régresse. Il ne s’agit plus de réfléchir mais de réagir. Le rêve de tous les annonceurs en fait qui poussent leur camelote sur le web à grand coup de stratégie « virale ».
Vos conseils ont beau être « réels » pour toucher la plus large cible possible, ils n’en participent pas moins à l’abêtissement collectif. Pour être compris, il faudrait à tout prix que je place des images explicites à côté de courtes injonctions genre « t’a vu ? même le boloss du tiékart kiff sa race et déchir tt avec ce soft. Download vite gros et deviens da big boss ! »
Je ne suis pas sûr de comprendre le propos. Je ne parle pas de toucher la cible la plus large possible ni de réduire le champ de l’expression écrite. Écrire simplement n’est pas uniquement l’apanage des populistes. On peut faire des phrases courtes sans sacrifier la qualité, il suffit de relire certains auteurs comme Flaubert…